Les dossiers de candidature à la légion d’honneur sont une source intéressant d’information. Pour cette étude la légion d’honneur de Léonce Fougeron a été instructive. Nous avons retrouvé des informations sur la base de données LEONOR et aux Archives Nationales.
Base LEONOR
La base LEONOR recense les dossiers des titulaires de l’Ordre de la Légion d’Honneur, conservés aux Archives Nationales. Léonce Fougeron, en qualité de propriétaire-éleveur, a été nommé chevalier le 17 janvier 1881, sur le rapport du Ministre de l’Agriculture et du Commerce. La notice détaillée de son dossier est par ailleurs disponible en ligne.
Services de Mr Fougeron
Son dossier contient une lettre « Service de Mr FOUGERON», rédigée par lui-même, et qui relate ses services rendus pour l’agriculture et surtout pour l’élevage de chevaux.
Voici le contenu intégral de la lettre :
Services de Mr. Fougeron
Mr. Fougeron a rendu de grands services à l’élevage de l’espèce chevaline nom seulement dans le Département de la Somme, mais encore dans le région du Nord, en entretenant depuis vingt ans un grand nombre d’étalons app—-nés et qui faisaient la monte dans les départements du Nord, du Pas-de-Calais, de la Somme et de la Seine-Inférieure.
Pendant cinq ans, de 1863 à 1868, Mr. Fougeron a entretenu dans son haras, à Breilly, 53 étalons, en a assuré le service qui était précédement fait par le dépôt d’étalon de l’Etat à Abbeville: il n’a cessé que par suite d’un désaccord survenu à cette époque avec Mr. Le Général Fleury, grand écuyer.
Non seulement, Mr. Fougeron a fait un grand pas à l’élevage, mais l’Etat a réalisé une économie considérable par la suppression du dépôt d’Abbeville – économie qu’on ne peut chiffrer a moins de cent mille francs par an.
Parmi les nombreux succès obtenus par Mr. Fougeron dans les concours d’animaux gras et reproducteurs, ainsi que dans les concours hippiques, on peut citer le prix offert par la Société des Agriculteurs de France et obtenu par lui en 1879, pour le plus bel étalon de race boulonnaise, attribué aux départements du Nord, du Pas-de-Calais et de la Somme.
C’est à son initiative, que les départements de la Somme et du Pas-de-Calais sont redevables du rétablissement du coucours de poulains —- boulonnais qui a eu lieu le 27 Septembre 1880.
Enfin, le haras de Breilly entretient encore actuellement 17 étalons.
Mr. Fougeron a été nommé en 1871 membre du Conseil Supérieur des Harras.
A l’exposition universelle de 1878, il a été nommé [membre] du Jury par le Ministre de l’Agriculture pour la section concernant l’espèce ovine et ensuite pour l’espèce chevaline par les exposants.Léonce Fougeron
28 février 1881
Archives Nationales
Aux archives nationales, une série de courriers traite de la décoration de Léonce Fougeron. Voici quelques extraits, qui montrent la dimention politique de la distinction, et souligne encore les succès et l’influence de Fougeron dans le paysagr agricole dans la Somme.
Lettre de Mr Dauphin au ministre, 1er Janvier 1880
Monsieur de Ministre,
Permettez-moi malgré votre communication défavorable sur le décoration de monsieur Fougeron, agriculteur dans la Somme, d’insister vraiment auprès de vous. Il n’est pas possible que vous ne reveniez pas sur cette décision.
J’ai voter lettre autographe du 25 septembre 1880, me promettant pour le 1er janvier cette faveur que, disiez-vous, vous ne pouvez accorder à cette date parce ue vous n’aviez pas une seule croix en réserve.
J’ai la lettre autographique de monsieur le ministre des … qui, à la même époque, après vous avoir vu, déclare que ce n’est qu’un retard de quelques semaines.
Ces documents ont été vus par Monsieur Fougeron, par nos amis politique du conseil général de la Somme. La décoration de monsieur Fougeron est attendus comme une certitude.
Vous voulez donc faire éclater une risée …… dans notre département sur lui, sur moi ! Et cela au moment où nous allions faire de Fougeron un candidat à la députation dans une lutte difficile contre un bonapartiste jusqu’ici…… Ajouterai-je que vous battez ma propre influence.
[…]
Lettre de Mr Dauphin au ministre – 16 décembre 1880
Monsieur le Ministre,
[…] J’avais à cette époque demandé que cette faveur luit fut accordée à l’occasion d’un concours d’étalon Boulonnais ouvert à Abbeville grâce à ses démarches. […]
Les titres de M. Fougeron vous ont été exposés par Monsieur le préfet de la Somme, qui le présente M. Fougeron occupé une grande situation dans notre contrée. Il y sera le véritable auteur de la reconstitution de la race boulonnaise.
Mais c’est au point de vue politique que j’insiste.
M. Fougeron est le seul qui puisse aux prochaines élections législative battre le Baron de Septenville député Bonapartiste de la Somme. Absolument républiquain, entré récemment au conseil général en remplacement d’un légitimiste propriétaire d’une grande fortune. Il va faire campagne et nous la ferons avec lui. Sa décoration sera à la fois une preuve de sympathie du gouvernement et en queslques sorte une récompense à tous les agriculteurs du département qui ont continué de le regarder comme un chef et leur défenseur.
J’ajoute que M. Fougeron dans les …. et dans les …. de ces derniers temps, a combattu énergiquement le théorie du droit compensatoirs en matière de culture.
Veuillez agréer […]
Lettre du préfet de la Somme au ministre, du 24 septembre 1880
Monsieur le ministre,
M. Fougeron, ancien élève de l’école de Grignon possède dans la commune de Breilly dont il est le maire, une très vaste propriété dans laquelle il se livre à des cultures qui ont été souvent citées comme exemples et récompensées.
Les prix nombreux qu’il a obtenus depuis des années dans tous les concours de la région le placent au premier rang des agriculteurs de ce pays. Mais c’est surtout par les services qu’il a rendus et continu à rendre en vue de l’amélioration de la race chevaline que M. Fougeron s’est réellement créé des titres à la haute récompense qui vous est demandée pour lui.
Depuis 20 ans, M. Fougeron dont les mérites ont pu être appréciés par le directeur général des Haras, met à la disposition des cultivateurs un certain nombre d’étalons approuvés qu’il entretient à grand frais dans sa propriété et qu’il disperse pendant diverses périodes de l’année dans plusieurs parties du département. En 1863, la suppression du dépôt d’étalons d’Abbeville qui devait donner un facil essor à l’industrie privée l’amena à diriger d’importantes opérations dans les départements du Nord, de la Seine-Inférieur et de la Somme, au moyen de 45 chevaux dont 30 avaient été achetés par lui au dépôt supprimé ; il rendit ainsi pendant cinq annéesd’importants services. S’il dût, en 1868, restreindre le nombre de chevaux entretenus dans ses écuries il ne céda que devant une réduction sensible du chiffre des subventions, réductions qui ne lui permettait plus de continuer à bon compte ses opération: Depuis lors, il a dirigé dans des conditions plus modestes mais toujours précieuses pour le pays, la même industries : il y emploie 20 chevaux dont 13 , les seuls qu’il ait d’âilleurs présentés, sont approuvés par l’Administration: Je doute qu’il retire grand profit ; on peut même dire qu’il a depuis bon nombre d’années sacrifié dans ses dépenses utiles sinon profitables par lui, une partie de sa fortune.
Ses succès dans les concours ne sont plus à compter ; il a obtenu plus de 200 médailles.
M. Fougeron a été de 1871 à 1874 membre du conseil supérieur des Haras ; ses pouvoirs ne furent pas renouvelés en 1874 en raison de ses opinions politiques qui sont républicaines. J’ai vivement regretté, Monsieur le Ministre, qu’il ne vous ait pas été possible en prendre en concidération, lors du dernier renouvellement la proposition que j’avais eu l’honneur de vous faire par lettre en date du 14 Juin dernier, des de réparer ce tort en lui rendant au sein de ce conseil supérieur une place qu’il y tenait avec une réelle compétemce et non sans utilité pour la région du Nord.
L’un de nos prédécesseurs voulut bien, en 1878 le nommer membre du jury à l’exposition universelle ; bien qu’absent, il fut désigné par les exposants, comme membres de la commission chargée de l’examen des chevaux admis à concourir. […]
Permettez-moi d’ajouter qu’à ces divers mérites, M. fougeron joint celui d’avoir été le promoteur du rétablissement du concours d’étalons de race boulonnaise qui va se tenir le 27 de ce mois après plusieurs années d’interruption à Abbeville, et qui promet de donner, par le grand nombre d’adhésion reçues jusqu’à ce jour, des résultats pleins d’espoirs pour l’avenir. […]
L’effet produit serait certainement considérable et d’un puissant encouragement pour les éleveurs de ce pays. Cette distinction serait également bien accueillie par l’opinion publique dans le département ; l’attitude très nette tenue par M. Fougeron au sein de conseil général est en effet justement appréciée par tous ceux qui sont attachés d’ancienne date ou ralliés aux institutions républicaines.
[…]